
Février 2025. Abisko, 250km au nord du cercle polaire arctique. La météo est clémente et les températures avoisinent les -10°C. À deux nous nous élançons sur le Kungsleden, "la voie royale" autrefois empruntée par les éleveurs de rennes lors des grandes transhumances.
En 5 jours d'itinérances nous passons des forêts clairsemées et des grands lacs gelés d'Alesjaure aux grands plateaux sauvages et désertiques de Sälka pour obliquer et rejoindre Nikkaluokta, fin du périple quelques 110 km plus au sud. À deux avec nos skis, nos peaux et nos pulkas contenant quelques 45kg de matériel et de nourriture. Les refuges sont gardés mais nous sommes en autonomie.


Fond de carte OpenTopoMap
D'Abisko à Abiskojaure, des forêts éparses recouvertes de neige laissant s'apercevoir au loin les hauts plateaux







L'immensité de la traversée d'un lac gelé sur plusieurs kilomètres. La glace est épaisse mais les conditions sont exceptionnelles pour la période. Le mercure ne descend qu'à -4°C, laissant la surface des lacs dégeler. Cette couche d'eau transformera le sol en patinoire dans la nuit, rendant notre marche plus difficile.

D'Abiskojaure à Alesjaure, les premières montagnes


La Pulka se hisse plus difficilement, toujours à deux nous nous aidons, l'un tirant, l'autre poussant. Nous nous élevons au fur et à mesure de nos pas pour rejoindre les premiers hauts-plateaux venteux. Glacial. A présent seuls. La neige est soufflée, froide mais glisse bien.
21 kilomètres pour rejoindre Alesjaure au terme d'une traversée de lacs sur lesquels le refuge est visible à 4km. l'illusion d'être arrivés, relativement exténués, pour découvrir qu'il nous reste plus d'une heure à cheminer sur la glace.




Le désert blanc

Nous y sommes. Pas complétement perdus, suivant les jalons du Kungsleden mais loins de tout. Le temps est calme ce matin, dans quelques heures nous serons enveloppés dans le jour blanc et de fortes chutes de neige, ne voyant pas à 20 mètres. Dans le silence ne raisonne que le crissement du glissement de nos pas.






Col de Tjäktja, 1150m, point culminant du sentier.
4km de montée régulière sous les soubresauts métalliques de notre traineau partagé.
Le temps se découvre et s'ouvre devant nous la vallée des merveilles. Sälka s'y cache en son sein. Quelques cabanes qui apparaissent dans la pureté irréelle de ces paysages sauvages.







Sälka, merveille cachée au creux de ces reliefs alpins...

...Et dans l'immensité et le silence, soudain le ciel s'embrase.



De cet écrin merveilleux la route s'ouvre à présent pour rejoindre Kebnekaise. -11°C sur le thérmomètre ce matin là.
Une vingtaine de kilomètres pour redescendre vers la civilisation et retrouver le contact avec nos proches restés sans nouvelles pendant 4 jours. Nous cheminons sur ces hauts plateaux alpins aux courbes lisses pour trouver un environnement plus rocailleux. Plus nous descendons et plus la neige laisse place à la glace. Nous dépensons pas mal d'énergie à conserver notre équilibre sans crampon sur le lit des fleuves gelés.








Kebnekaise puis le retour à Nikkaluokta, signant la fin de notre périple. 5 jours dans ces grands espaces à l'extrême nord de la Suède. Dans ce froid arctique qui nous aura ménagé sous l'oeil curieux des rennes.





Infos pratiques
- Ce voyage a été réalisé fin février, début mars. Les refuges venaient d'ouvrir depuis quelques jours. A ces dates, les journées s'étalent d'environs 6h à 18h. Les températures ne sont pas descendus sous les -11°C en journée (les -4°C du début de séjour étaient exceptionnelles). Les conditions étaient sèches pour la saison avec peu de neige en début et fin de parcours, rendant la progression plus compliquée sur la glace. Prévoir des crampons n'est pas une mauvaise idée.
- Le matériel (skis, pulka, batons, peaux, chaussures) a été loué à Abisko (https://www.swedishtouristassociation.com/facilities/stf-abisko-turiststation/). Il est possible de laisser le matériel à Nikkaluokta plutôt que le ramener à Abisko. Pour deux personnes, une pulka est suffisante, préférer les modèles tractés par barres rigides (comme nous avions) plus simple à manœuvrer en descente que les pulkas tractées par corde.
- Un train très abordable et quotidien permet de rejoindre Abisko depuis Kiruna. De Nikkaluokta, un bus permet de faire la jonction avec Kiruna (réserver le bus en ligne pour des tarifs plus abordables).
- Il est conseillé d'adhérer à la STF (Swedish Tourist Association) pour profiter de réductions sur les réservations https://www.swedishtouristassociation.com/join-stf/#h-membership-benefits
Tous les refuges sont réservables en ligne en amont. Certains refuges disposent d'un petit magasin (succint), il sont équipés de terminaux pour paiement en CB (même les plus isolés) et ce mode de paiement est privilégié par les Suédois. Les refuges sont des lieux en auto-gestion, une fois arrivés investissez-vous pour aller chercher de l'eau aux points préparés (généralement un trou dans la glace avec tout matériel à disposition) et coupez du bois pour les suivants.
- Il n'y a aucun réseau téléphonique sur l'itinéraire, se renseigner sur les conditions auprès des guides d'Abisko avant le départ, ils sont disponibles et échangeront avec vous avec plaisir. les conditions météo à J+2 sont très peu fiables. Le DVA n'est pas utile si l'on reste sur l'itinéraire officiel. Certains lacs ne sont pas contrôlés (concernant la résistance de la glace), ne pas s'y aventurer en l'absence de traces. En cas d'urgence, des téléphones sont accessibles dans tous les refuges.
